Des enseignants chevronnés pour en finir avec la fracture scolaire ?

L’OCDE dans un nouveau rapport s’appuie sur les données de l’édition 2018 de l’Enquête internationale sur l’enseignement et l’apprentissage (TALIS) et « examine les modalités de répartition des enseignants entre les différents types d’établissements ». Il interroge ainsi dans quelle mesure « les élèves ont accès à des enseignants efficaces et à de bons environnements d’apprentissage ». En conclusions, les recommandations concernant les politiques éducatives visent à « contribuer à une répartition plus équitable des enseignants et, potentiellement, à une diminution des inégalités socio-économiques dans les résultats des élèves ».

Le constat est dorénavant partagé : « certaines caractéristiques individuelles des élèves, sur lesquelles ils n’ont aucune prise, comme la profession de leurs parents, la langue qu’ils parlent à la maison ou encore leur lieu de naissance, tendent à être d’importants facteurs prédictifs de leurs résultats scolaires » dans la plupart des systèmes éducatifs. La remédiation à l’influence de ces paramètres sociaux et culturels – facteurs indépendants de la volonté d’implication des élèves dans les apprentissages – dans la réussite scolaire nécessite « de consacrer délibérément davantage de ressources aux élèves partant avec un désavantage ». Il s’agit pour l’OCDE d’étudier les conditions de construction d’une équité. Celle-ci dépend de très nombreux critère : le rapport rappelant à plusieurs reprises que « l’enseignement est une activité complexe et multidimensionnelle, également influencée par des facteurs contextuels ». Pour autant, et parmi les différents éléments qui peuvent favoriser une meilleure réussite scolaire, « la qualité des enseignants reste de loin le levier le plus efficace ». En effet, « de nombreux travaux de recherche montrent en effet que les enseignants ont un impact important sur les résultats de leurs élèves, impact qui s’avère durable et ne se limite pas aux résultats scolaires ou à d’autres aspects cognitifs, puisque l’on dispose désormais de preuves solides que les enseignants peuvent également améliorer les compétences sociales et émotionnelles de leurs élèves ».

Comme alors identifier un enseignement et un.e enseignant.e « efficaces » ?

La question est plus délicate. De récents travaux de recherche tendent à montrer « l’importance de l’adéquation entre d’une part, les caractéristiques et les pratiques pédagogiques des enseignants, et d’autre part, les caractéristiques et les profils d’apprentissage des élèves », mais que plus globalement « certaines caractéristiques et pratiques pédagogiques des enseignant.e.s sont en moyenne, plus que d’autres, systématiquement associées à de meilleurs résultats chez les élèves ». Le rapport en retient six : « l’ancienneté ; le sentiment d’efficacité personnelle ; la capacité à maximiser le temps d’enseignement ; la clarté de l’enseignement ; le recours aux pratiques d’activation cognitive ; et le contenu de la formation initiale ». Il indique également d’« autres facteurs ayant une forte incidence sur les résultats des élèves » dépendant davantage des missions « des chefs d’établissement et de leur capacité à créer des communautés propices à l’apprentissage », comme « la gestion du programme d’enseignement, la satisfaction des besoins de développement professionnel des enseignants et la mise en place d’une culture de collaboration ».

Ainsi, et même s’il faut se garder de généraliser, un.e enseignant.e bénéficiant d’une ancienneté supérieure à dix années d’enseignement, conscient.e de son efficacité professionnelle, sachant maximiser le temps d’enseignement dans ses cours, ayant un contenu clair de son enseignement, capable de mobiliser la participation cognitive de ses élèves et pouvant s’appuyer sur une formation initiale solide, permet de meilleurs résultats dans les apprentissages de ses élèves, quelles que soient leurs caractéristiques économiques, sociales et culturelles.

Pour le dire autrement, le rapport note qu’un « consensus se dégage lentement sur ce qui caractérise un enseignement et un enseignant « efficaces ». Un bon enseignement nécessite une classe bien gérée, dans laquelle les perturbations sont réduites au minimum et le temps d’apprentissage, maximisé. Les enseignants efficaces doivent être capables de communiquer de manière claire et exhaustive ; ils doivent aider leurs élèves à acquérir une compréhension approfondie du sujet étudié en leur demandant d’évaluer, d’intégrer et d’appliquer des connaissances pour résoudre des problèmes ; ils doivent pouvoir leur apporter un soutien efficace, en se montrant attentifs à leurs besoins, en respectant leurs idées et en les encourageant ; ils doivent en outre leur fournir des commentaires constructifs par le biais d’évaluations formatives et sommatives. Les enseignants efficaces doivent aussi, bien sûr, être des professionnels compétents, c’est-à-dire posséder et continuer de développer les connaissances adéquates sur le plan du contenu et de la pédagogie, ainsi que des compétences affectives et motivationnelles – toutes composantes qui doivent nourrir leurs pratiques d’enseignement ».

A ces éléments s’ajoutent ceux relatifs à la favorisation des conditions d’apprentissages dans la vie de l’établissement scolaire : le climat scolaire, la coopération entre les enseignant.e.s, le tutorat pour les nouvelles et nouveaux… Ainsi que la capacité de recours au numérique comme support d’enseignement (auquel le rapport consacre un chapitre, la pandémie de Covid-19 ayant particulièrement rendu sensible cette approche).

Si le rapport de l’OCDE ne semble mettre en évidence que des critères par ailleurs déjà fortement connus, il pointe également que dans une majorité de systèmes éducatifs, ces caractéristiques positives pour la réussite scolaire sont concentrées majoritairement dans des « des établissements comptant une forte proportion d’élèves issus d’un milieu socio-économique favorisé ». Se pose donc la question de la mixité des établissements scolaires ou de l’évolution des dispositifs d’affectations des enseignant.e.s dans les établissements et tout particulièrement dans ceux accueillant un public issu de milieu défavorisé.


En finir avec la fracture scolaire : Avoir des enseignants chevronnés dans les établissements qui en ont le plus besoin

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